28. mai, 2013

L'escalier

"Trois ans, déjà ou à peine, depuis cette nuit blanche sous les arbres du Tholonet où je recevais cet amour, ce premier amour, premier grand amour. Cette nuit du 13 juillet où je chuchotais à ton oreille, n’osant pas clamer trop fort, le seul poème que j’avais appris par cœur. Par cœur pour toi.

Nos vies s’étaient croisées six mois avant ce murmure, ce jour où tu vins vers moi au bras de mon meilleur ami Charly. Ton air amusé, ta joie de vivre, ton regard si bleu, si profond, tout m’emportait à mon insu dès cette première rencontre. Six mois que j’étais à tes côtés sans voir ce qui pouvait crever les yeux les plus clos. Six mois à te respirer, à laisser naître cet amour, six mois à colérer de te voir si mal assortie avec mon Charly qui te trompait à la moindre occasion.

Jusqu’à ce soir d’été. À Aix, où vous étiez descendus chez Anne-Marie qui vous avait prêté la maison du chemin de Bibenus.

Ce soir où il te confia à moi pour un week-end, prétextant un rendez-vous de travail sur la Côte, à moi l’ami qui savait qu’il allait vers une autre.

Ce soir où je lui devais de te distraire, ce soir où tout bascula dans la salle voûtée du restaurant grec de la rue des Cordeliers.

Nous parlions, parlions, je t’écoutais, si drôle, si fantasque, si artiste. Cela me prit comme ça, dans la poitrine, infarctus d’amour. Une douleur terrible. L’étreinte si forte, que je ne pouvais plus parler. Plus respirer. Je n’entendais plus tes mots, j’étais dans tes lèvres, dans tes yeux, tu parlais, parlais, je n’entendais plus rien. Pris dans cette bourrasque qui emportait mon cœur. Je conservais figé un sourire mièvre, tu ne te rendais même pas compte de cette tempête qui m’étreignait. Je m’ouvrais enfin à ce que mes yeux ne voulaient pas voir depuis des mois. Me submergeait là cet amour enfermé depuis six mois, si fort que j’ai cru en mourir.

Nous sommes partis ensuite vers Vauvenargues, un bal de village se tenait là bas… Mon cœur battait dans tous les sens…. Ma main sur le pommeau de vitesse effleurait la tienne ou bien ta jambe, j’en sentais la chaleur qui m’appelait si douloureusement, l’amour criait pour m’emporter… Soir d’été, air chaud et doux d’un soir d’été, air chaud et doux qui caresse mes joues frémissantes de l’amour de l’aimée enfin trouvée… Soir d’été… Jusqu’à ce que nous arrivions sur cette allée d’arbres sur la route du Tholonet… Tard…Tard dans la nuit, je ne sais plus quand, ne compte pas le temps qui ne compte plus… Des mots, des mots, enlacés les uns aux autres tentant piteusement d’enlacer l’amour naissant… Je t’avais enfin trouvée mon amour, enfin trouvée… Mais je ne pouvais te le dire encore... Tout en retenue… Je ne pouvais que chuchoter, te chuchoter mes mots au creux de ton oreille, humant au voyage tous tes parfums, sentant au loin, pourtant si proche, ton cou sur lequel je soufflais la brise de mon cœur, effluves des parfums d’une peau enfin trouvée, la nuit s’écoulait, le vent passait doucement dans les arbres, je n’y arrivais pas, arrivais pas à trouver la force de poser un baiser, un seul au moins, sur tes lèvres décidées, ici et maintenant miennes pour l’éternité.

J’ai eu très peur aussi, de toi, de l’autre, même infidèle qui était mon ami, j’étais pris par l’effroi de trahir, de mentir, mais l’amour l’emportait, il était si fort ce premier amour mon amour, je n’étais rien face à lui, il m’emportait, comme m’emportait ton rire, ta force, amazone, toi si belle, si jeune, si fraîche, mon aimée pour toujours…" Extrait de Jeunesses volées

 

Commentaires

28.05.2013 19:20

marie

Quand l'amour nous rend léger et si heureux et en même temps nous fait si mal. Il faut connaître un tel amour au moins une fois dans sa vie.